#Fichier T.E.S : pas de 2ème affaire S.A.F.A.R.I… (23/10/2018)

#Fichier T.E.S : pas de 2ème affaire S.A.F.A.R.I… (23/10/2018)

Dans son arrêt daté du 3 octobre dernier, le Conseil d’État, la plus haute juridiction de l’ordre administratif français, porte un coup d’arrêt définitif aux recours des associations comme la Quadrature du net ou Génération libre à l’encontre du décret instituant le fichier T.E.S (ou Titres Électroniques Sécurisés)!

En cause, l’interconnexion sur un support unique des données personnelles et des données biométriques (dont les empreintes digitales) des fichiers déjà existants des passeports et des cartes d’identité de 60 millions de Français…

La polémique sur ce fichier TES n’a pas cessé depuis la publication de son décret en octobre 2016, sans toutefois provoquer le même scandale que l’affaire SAFARI !

– L’affaire SAFARI, c’était un projet du gouvernement de l’époque révélé par le journal le Monde en 1974 dans un article « SAFARI ou la chasse aux français ». Profitant de l’avènement de l’informatique, ce gouvernement n’avait pas hésité à interconnecter (comme le fichier T.E.S)  les fichiers de la sécurité sociale, de la fiscalité et de la police sur une seule et même base de données !

Vous connaissez la suite, nous l’avions déjà évoqué dans une précédente chronique, ce projet provoqua une telle émotion de l’opinion publique rappelant les heures sombres   de la 2ème guerre mondiale qu’il fût rapidement abandonné au profit d’une loi « Informatique et libertés » et la création de la CNIL.

Même si l’objectif du fichier T.E.S est louable, celui de lutter contre l’usurpation ou la fraude d’identité, le précédent gouvernement n’était pas au-dessous des lois.

– Rappelons que pour la CNIL , autorité publique indépendante « Toute base de données biométrique relève de la loi « Informatique et libertés« .

Dans son arrêt, le Conseil d’État a choisi de mettre en avant l’efficacité du fichier TES   pour un « motif d’intérêt général », la protection de l’ordre public.

– Dans un État de droit, on peut toutefois regretter l’absence de débat parlementaire d’un tel projet qui centralise des fichiers sensibles contenant des données biométriques à l’ère d’une cybercriminalité mondiale ou le risque zéro n’existe pas.

D’autant plus que ce fichier T.E.S offre désormais une base règlementaire sur 60 millions de français avec pour un futur gouvernement moins démocratique en France la possibilité d’y ajouter une fonction recherche à des fins de surveillance de sa population (comme la reconnaissance faciale en Chine)  sans même voter de nouvelle loi !

Nul doute qu’il faille garder en mémoire la célèbre mise en garde de Benjamin Franklin : « un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l’un, ni l’autre et finit par perdre les deux».

 

Nathalie Chiche

Rapporteure d’une étude du CESE sur la Gouvernance d’internet